Areva ne fera pas la loi au Niger - Communiqué de Presse du 21 octobre 2009
A lâoccasion des Ă©lections lĂ©gislatives nigĂ©riennes du 20 octobre 2009, le Collectif Areva ne fera pas la loi au Niger a tenu une confĂ©rence de presse hier, mercredi 21 octobre 2009 Ă lâAssemblĂ©e Nationale.
Dans le contexte actuel de durcissement du pouvoir, l'Ă©mergence d'un dĂ©bat dĂ©mocratique autour des questions miniĂšres et la lutte de la sociĂ©tĂ© civile sur les conditions dâexploitation de lâuranium Ă©tant de plus en plus difficile, notre Collectif a portĂ© lâattention sur la question sensible des consĂ©quences de cette industrie sur les ressources en eau.
Le Niger vit une trĂšs grave crise : un coup dâEtat constitutionnel du prĂ©sident Mamadou Tandja qui, passant outre les rĂšgles de la dĂ©mocratie parlementaire, a organisĂ© le 4 aoĂ»t dernier, un rĂ©fĂ©rendum pour se maintenir au pouvoir. Les Ă©lections lĂ©gislatives du 20 octobre 2009 avaient pour seul but dâasseoir le nouveau rĂ©gime et de parachever son coup dâEtat. Le scrutin a Ă©tĂ© majoritairement boycottĂ© par les partis dâopposition et la population. En effet, en tenant ces lĂ©gislatives le chef de lâEtat a finalisĂ© son plan de confiscation du pouvoir passant outre lâĂ©lection prĂ©sidentielle prĂ©vue fin 2009 et usant de moyens disproportionnĂ©s et insidieux lui permettant de rĂ©duire Ă nĂ©ant toute opposition.
AprĂšs sâĂȘtre trop faiblement Ă©mue de cette situation, la communautĂ© internationale a rĂ©agi fermement : La CommunautĂ© Ă©conomique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) a « suspendu » le Niger « jusquâĂ ce que la lĂ©galitĂ© constitutionnelle soit rĂ©tablie », et a alertĂ© lâUnion Africaine ; lâUnion EuropĂ©enne menace de suspendre son aide au dĂ©veloppement conformĂ©ment aux prescriptions de lâarticle 96 des accords de Cotonou, en laissant toutefois place aux nĂ©gociations. Quant Ă la France, elle a maintenu une position particuliĂšrement ambiguĂ« jusquâĂ la veille des Ă©lections lĂ©gislatives, contribuant Ă lâattentisme gĂ©nĂ©ral. Cette attitude revient Ă cautionner le coup d'Etat constitutionnel et Ă contribuer Ă la normalisation d'une situation illĂ©gale. A nouveau, la France privilĂ©gie ses intĂ©rĂȘts Ă©conomiques sur la promotion de la dĂ©mocratie et le respect de l'Etat de droit. En effet lâexploitation de lâuranium par Areva se poursuit et la mise en exploitation de la mine dâImouraren lui offre dâĂ©normes perspectives.
Cette exploitation uranifĂšre au nord du pays conduit Ă la contamination des ressources en eau et Ă l'Ă©puisement et la pollution des deux grandes nappes phrĂ©atiques fossiles de la rĂ©gion dâAgadez, qui assuraient jusquâici la survie des populations locales. Cela est tout aussi dramatique que la spoliation des terres agro-pastorales exploitĂ©es par les populations locales, la destruction de la faune et de la flore ou la contamination radioactive de l'air dues Ă cette mĂȘme industrie.
Depuis des millĂ©naires les populations nomades frĂ©quentent lâimmense plaine de lâIrhazer et gĂšrent de façon traditionnelle les ressources nĂ©cessaires Ă lâĂ©conomie pastorale. LâaquifĂšre des grĂšs dâAgadez, seule ressource en eau de cette plaine, est fossile. Or la rĂ©gion regorge dâuranium, qui est en partie dĂ©jĂ exploitĂ© par lâindustrie uranifĂšre avide dâeau : ce rĂ©servoir est fortement menacĂ© par lâoctroi anomique de concessions miniĂšres et par lâexploitation en cours et se vide inexorablement. Cela ne perturbe aucunement les sociĂ©tĂ©s miniĂšres dont le comportement se rĂ©sume à « prendre, polluer et partir ».
Les quantitĂ©s quotidiennes dâeau consommĂ©e par les miniers sont effarantes :
- 10.000 m3/j sont prĂ©levĂ©s Ă Rharous depuis 1980, pour les mines de charbon (qui alimente en Ă©lectricitĂ© les installations dâAreva Ă Arlit).
- 20.000 m3/j sont prĂ©vus par Areva, pour sa nouvelle exploitation uranifĂšre dâImouraren,
- 4000 m3/j sont prĂ©levĂ©s pour la mine dâuranium dâAzelik, exploitĂ©e par une compagnie chinoise.
En comparaison : moins de 2 000 m3 par an et par habitant sont consommĂ©s dans les pays oĂč les ressources en eau sont faibles.
Et ce nâest pas tout : les sociĂ©tĂ©s COMINAK et SOMAĂR (filiales dâAreva) qui exploitent les mines dâArlit envisagent dâutiliser un pipe line de 30 km et de dĂ©placer leurs pompages vers lâouest c'est-Ă -dire dans la nappe des grĂšs dâAgadez ! En effet, ils ont dĂ©jĂ Ă©puisĂ© Ă 70% la nappe phrĂ©atique carbonifĂšre qui se trouve plus au nord, Ă raison de 22 000 m3/j depuis 38 ans.
Le prĂ©lĂšvement actuel est de 25 millions de m3 dâeau par an. Ce calcul est non exhaustif car il ne tient pas compte de lâaccroissement exponentiel de la dĂ©livrance des permis dâexploitation de lâuranium, du futur projet des salines de TĂ©dikelt et de projets pharaoniques dâirrigation. A ce rythme lĂ , on peut sâattendre au dĂ©noyage, câest Ă dire Ă lâĂ©puisement complet de toute la partie ouest de lâaquifĂšre dâici 40 ans.
Les effets pervers de lâexploitation uranifĂšre : loin dâavoir amĂ©liorĂ© le niveau de vie des populations, elle condamne leur avenir Ă moyen terme
Le Niger deuxiĂšme producteur mondial dâuranium figure paradoxalement Ă la derniĂšre place de lâIDH. Les populations nigĂ©riennes victimes dâun pillage organisĂ© des ressources naturelles, y compris de lâeau ressource vitale, rĂ©coltent dĂ©sordres et dĂ©solation et non pas les richesses Ă©manant de cette industrie stratĂ©gique et trĂšs lucrative. Les compagnies miniĂšres ne sâinquiĂštent guĂšre de cette catastrophe annoncĂ©e : une fois les gisements dâuranium Ă©puisĂ©s, une fois lâeau Ă©puisĂ©e, la rĂ©gion ne prĂ©sentera plus dâintĂ©rĂȘt pour elles et leurs actionnaires. Ils quitteront cette rĂ©gion dĂ©vastĂ©e, dĂ©sormais impropre au tourisme et Ă lâĂ©conomie pastorale et sans dĂ©veloppement pour aller piller ailleurs. Lâavenir de toute une population, les impĂ©ratifs de protection de lâenvironnement et de la santĂ©, sont sacrifiĂ©s sur lâautel des profits Ă court et moyen terme.
Ă lâheure oĂč la notion de dĂ©veloppement durable, admise par tant d'occidentaux, est mise en avant, le nuclĂ©aire, est prĂ©sentĂ© par les industriels, dont Areva, comme une Ă©nergie « propre ». Or lâextraction de lâuranium est terriblement polluante et dangereuse puisquâelle sâattaque Ă lâhomme et ses ressources hydriques vitales et Ă©puisables. Il est hypocrite de nous vendre une Ă©nergie prĂ©tendue sans effets nĂ©gatifs et sans consĂ©quences, alors que loin de nous des populations, aux conditions de vie dĂ©jĂ trĂšs prĂ©caires, en souffrent et en meurent.
Nos revendications :
Nous demandons instamment, pour lâexploitation de lâuranium au Niger, le respect des droits de lâhomme et des rĂšgles de transparence fixĂ©es dans le cadre de lâinitiative sur la transparence des industries extractives (ITIE) Ă laquelle le Niger a adhĂ©rĂ© en mars 2005 ainsi que la fixation de normes sociales et environnementales, notamment sur lâeau et la mise en Ćuvre dâorganismes indĂ©pendants de contrĂŽle qui sanctionnent leurs manquements.
Le détail de nos revendications ICI.
Contacts presse : arevaneferapaslaloi@gmail.com